Témoignage de la fille d’une patiente : 

"Elle avait longtemps été journaliste. Une pionnière pour son époque. À nonante ans passés, elle écrivait toujours. Elle tenait notamment sur Internet un blog poétique qui séduisait de très nombreux lecteurs. Malgré les inévitables drames d’une vie, elle restait aussi enjouée, attentive aux autres et coquette. Sa vitalité forçait l’admiration. Et puis, presque sans crier gare, le cancer. Il a fallu opérer. Très vite, elle a su que cela ne la sauverait pas, tout au plus cela prolongerait de quelques mois, une ou deux années peut-être, une vie nécessairement altérée. Elle avait besoin de soins et ne pouvait plus rester chez elle. Il a fallu se résigner à la maison de repos. Après une pénible période de chimio - qu’elle n’a pas souhaité prolonger même si elle savait que sa décision rapprochait l’échéance finale - elle a été suivie par une équipe de soins palliatifs. C’est là que Bénédicte est entrée en scène. Chaque mardi, l’aimable volontaire venait lui rendre visite. Pour parler, aller prendre un thé dans un établissement proche ou faire une course. Très vite, des liens que l’on peut qualifier d’amitié se sont noués entre la nonagénaire et cette quadragénaire dynamique, soucieuse d’égayer la journée de sa protégée. Bientôt, Maman s’est mise à attendre ces visites qui la distrayaient d’un quotidien nécessairement routinier. Ce jour-là, elle choisissait sa toilette avec plus de soin, se maquillait un peu et je sais que ce sont des échanges riches qui occupaient les heures d’après-midi. Pour moi, qui venais de perdre mon mari et rendais visite à Maman presque chaque jour, le mardi devenait ainsi un moment de répit, où je ne devais pas me préoccuper d’elle, de sa santé, de son moral. Je savais qu’elle était en de bonnes mains, qu’elle était bien. Et moi, j’étais en paix.Cette harmonie a duré six mois. Puis, les douleurs sont apparues, de plus en plus fortes, de plus en plus fréquentes. Bénédicte était présente le jour où il est devenu nécessaire d’augmenter les doses de morphine. Nous savions qu’ensuite elle sombrerait définitivement dans le coma. J’ai apprécié d’avoir une personne empathique à mes côtés à ce moment-là qui fut véritablement celui de l’adieu. Maman mourait deux jours plus tard. Sans souffrir". 
Marianne.

Témoignage de volontaires :

"Madame a souhaité la présence d’une volontaire qui aimait écrire, car madame voulait répondre à des messages de réconfort.  C’est ainsi qu’au fil des semaines, avec ses propres mots, la patiente a pu s’exprimer sous  la plume de Monique.
La patiente,  férue de littérature  policière, lui a aussi  demandé de lire à haute voix, une nouvelle de Fred Varga, elles ont ainsi partagé leurs questions sur l’issue de l’intrigue. Des temps chaleureux, émouvants, des sourires dès l’arrivée et une attente réciproque des retrouvailles  de la semaine suivante". 
Monique.   

"Mardi 14 heures, je démarre la voiture.  15 Km pour faire le vide en moi ; comment sera Monsieur Ferdinand aujourd’hui ?  Fatigué ?  En forme ?
Toc, toc, c’est Gabrielle, la bénévole.  Il est là, seul au living, dans son lit.  Je pose ma main sur son bras, il me regarde et me dit comme chaque fois avec son regard attendrissant : «Vous allez bien ?»
Parfois nous échangeons, parfois nous regardons la TV.  Et si la fatigue est trop importante, il dort mais il vérifie régulièrement si je suis toujours présente, et son sourire, quel cadeau !"  
Gabrielle.